Au Nord, des millions d’ouvriers désespèrent de la vie parce qu’ils sont sans travail. Au Sud, des millions d’ouvriers désespèrent de la vie parce qu’ils ont trop de travail. Ce paradoxe porte un nom, la mondialisation. Au Vietnam, un jeune chef d’entreprise a accepté le projet. Seul, il a décidé de rompre la loi du silence, car ici, comme dans tous les pays émergeants, il ne faut jamais se plaindre, l’investisseur étranger est sensible, il pourrait prendre peur. Il témoigne des pratiques des donneurs d’ordre et pose à voix haute une question : « Ai-je le choix ? Est-il possible de m’opposer au diktat des donneurs d’ordre ? Est-il possible de ne pas faire travailler mes ouvriers comme des esclaves ? Ai-je le choix ? » En France, j’ai rencontré les ex-ouvrières de chez Levi’s. Une dizaine ont encore la force de témoigner, les autres non. Depuis la fermeture de leur entreprise en 1999 elles vivent du chômage et de petits boulots. Pour ne pas sombrer, elles ont écrit un livre et monté deux pièces de théâtre. Tout les sépare, les dix-huit heures d’avion, les cultures, la religion, le système politique des dirigeants et bien d’autres valeurs… Cependant elles ont un point commun : le travail. Qu’il soit en excès ou totalement absent, il est source d’angoisse et de souffrance.